À 62 ans, Annie espérait savourer une retraite bien méritée après presque 40 ans comme caissière. Ce qu’elle perçoit chaque mois révèle beaucoup sur le fonctionnement du système actuel.
Je l’ai rencontrée dans une maison modeste en périphérie d’Angoulême. Annie, 62 ans, vient tout juste de ranger son uniforme de caissière. Quarante ans à scanner des articles, encaisser des clients, sourire parfois malgré la fatigue. Une carrière sans faute dans une grande enseigne, avec un salaire souvent légèrement au-dessus du SMIC. D’un ton franc et sans détour, elle m’a confié :
« Après 39 ans comme caissière à 1900 € par mois, ma retraite nette s’élève exactement à 1 095 € par mois. »
Un salaire modeste pour une carrière pleine
Pendant ces 39 années, Annie n’a connu presque aucune interruption. Elle a travaillé à temps plein la majeure partie du temps, avec un salaire moyen d’environ 1900 € brut par mois, soit environ 1470 € net. Tous ses trimestres ont été validés, condition indispensable pour toucher une retraite à taux plein. Elle a quitté son emploi à 62 ans, juste après avoir atteint ce quota.
Le minimum contributif vient compenser partiellement
Sa pension de retraite se compose de deux volets principaux : la retraite de base, versée par la CARSAT, et la retraite complémentaire, gérée par l’Agirc-Arrco. Le montant brut mensuel total atteint 1 203 €. Voici le détail précis de cette répartition :
| Composante | Montant brut mensuel |
|---|---|
| Retraite de base (avec minimum contributif) | 881€ |
| Retraite complémentaire Agirc-Arrco | 322€ |
| Total brut mensuel | 1 203€ |
Après déduction des prélèvements sociaux (CSG, CRDS, CASA) d’environ 9 %, Annie reçoit 1 095 € net par mois. Ce montant correspond aux barèmes actuels pour les retraités à taux plein ayant des revenus modestes.
Le calcul derrière le montant
Pour Annie, les 172 trimestres requis ont été atteints, lui permettant de bénéficier du taux plein. Cependant, compte tenu de son salaire relativement faible, une aide du minimum contributif a été appliquée. Ce dispositif garantit un revenu minimal aux salariés ayant une carrière complète mais des rémunérations modestes. En 2025, ce minimum s’élève à 893,66 € brut par mois pour ceux ayant cotisé au moins 120 trimestres.
Sa retraite complémentaire dépend des points accumulés tout au long de sa carrière. Avec un salaire brut moyen proche de 2 470 € (soit environ 1 900 € net), Annie a cumulé suffisamment de points pour recevoir environ 322 € brut par mois, un montant correspondant à la moyenne pour cette tranche de revenus.
Une vie de travail qui laisse un goût amer
Assise dans son salon, Annie confie que ce revenu mensuel reste difficilement suffisant, surtout avec un loyer à payer. N’ayant jamais été propriétaire, et avec des aides sociales réduites depuis son départ à la retraite, la situation se complique.
« Je n’ai jamais compté mes heures. Je n’ai jamais voulu tricher. Maintenant, je compte chaque euro. »
Elle croyait que cotiser toute sa vie garantirait une sécurité financière. Les chiffres lui ont prouvé le contraire.
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Des disparités encore importantes entre secteurs
Le cas d’Annie n’est malheureusement pas isolé. Selon le ministère du Travail, la pension moyenne des femmes ayant pris leur retraite en 2023 s’élève à environ 1 145 € net par mois, contre 1 646 € pour les hommes. L’écart reste significatif, en raison de plusieurs facteurs :
- Carrières souvent interrompues chez les femmes (enfants, temps partiels imposés)
- Moins d’accès aux postes à responsabilité, donc des rémunérations plus faibles
- Durée d’assurance parfois incomplète, même à l’âge légal de départ
Cette situation illustre un déséquilibre structurel plus large. Le système, conçu pour des carrières linéaires et continues, ne reflète plus toujours la réalité du marché du travail actuel.
Et maintenant ?
Pour Annie, vivre avec 1 095 € par mois implique de renoncer à beaucoup : vacances, restaurants, ou certaines dépenses de santé non remboursées. Elle bénéficie d’un petit complément via l’aide au logement, mais reprend une activité reste impossible : son corps ne suit plus après tant d’années debout.
« J’ai fait deux infiltrations l’an dernier pour les lombaires. Travailler, c’est fini. Mais je dois surveiller chaque facture. »
Aucun miracle. Après 39 ans de service, de soirées et samedis travaillés, et d’heures supplémentaires, la retraite ressemble davantage à une gestion stricte du budget qu’à une véritable récompense. Le cas d’Annie illustre une réalité que beaucoup pressentaient, mais qu’ils ne pouvaient jamais chiffrer avec précision.
FAQ
Quel est le montant moyen de la retraite d’une caissière après 39 ans de travail ?
Après 39 ans à 1900 € par mois, une caissière peut percevoir environ 1 095 € net par mois.
Comment se calcule la retraite de base pour une caissière ?
La retraite de base se calcule selon la formule : Salaire annuel moyen × 50 % × (trimestres validés ÷ trimestres requis).
Qu’est-ce que la retraite complémentaire Agirc-Arrco ?
C’est un complément basé sur les points accumulés tout au long de la carrière, qui vient s’ajouter à la retraite de base.
Qu’est-ce que le minimum contributif et qui en bénéficie ?
Le minimum contributif garantit un revenu minimal aux salariés ayant une carrière complète mais un salaire faible. En 2025, il est de 893,66 € brut par mois.
Pourquoi le revenu net peut-il être inférieur au brut ?
Les prélèvements sociaux (CSG, CRDS, CASA) d’environ 9 % réduisent le montant brut pour obtenir la retraite nette.
Existe-t-il un écart entre les retraites des hommes et des femmes ?
Oui, en 2023, la pension moyenne des femmes était de 1 145 € net, contre 1 646 € pour les hommes, en raison de carrières souvent interrompues et de salaires plus faibles.
Comment le temps partiel influence-t-il la retraite ?
Les périodes à temps partiel réduisent le salaire moyen et donc la pension calculée, ce qui peut nécessiter le minimum contributif pour atteindre un revenu décent.
Conclusion
Le parcours d’Annie illustre parfaitement la réalité de nombreuses caissières en France : des carrières longues et rigoureuses, souvent rémunérées modestement, et une retraite qui peine à refléter ces années de travail. Avec un revenu net mensuel de 1 095 €, elle doit désormais jongler avec les dépenses quotidiennes, la santé et les imprévus, malgré une carrière complète et sans interruption.
